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2017/04/24
Régime « RND » et la détention indirecte de l’immobilier britannique - Opinion de Drazen Turujlija

Le statut fiscal de résident non-domicilié (RND) a récemment été remanié par le gouvernement britannique. Outre le fait que sa durée soit désormais limitée à 15 ans, il ne permettra plus d’échapper à l’impôt sur les successions (IHT) relativement aux immeubles situés au Royaume-Uni.

En effet, l’immobilier britannique détenu directement par une personne physique est par principe soumis à l’IHT. Cependant, il était d’usage que de tels biens soient détenus par les RND à travers une société étrangère ou un véhicule similaire. Dans ce cas, le patrimoine de la personne se composait d’actions étrangères (et non d’immeubles), situées en dehors du Royaume-Uni et échappait ainsi à l’IHT.

Dès 2013, le gouvernement britannique a tenté de dissuader la détention indirecte d’immeubles en introduisant un impôt spécial appelé ATED (Annual Tax on Enveloped Dwellings). Cet impôt frappe les entités étrangères propriétaires d’immeubles résidentiels situés au Royaume-Uni. Son montant est progressif, il dépend de la valeur du bien et est révisé annuellement. Il peut atteindre GBP 220’000 (au titre de 2017) pour des immeubles dont la valeur dépasse GBP 20 millions. Nonobstant les montants élevés payés au titre de la taxe ATED, certains RND continuaient cependant à détenir leur immobilier britannique par des sociétés étrangères, afin d’échapper à l’IHT qui est prélevé au taux de 40%.

Changement législatifs intervenus

La réforme, entrée en vigueur le 6 Avril 2017, vient inclure dans le champ de l’IHT les immeubles britanniques détenus par une structure « offshore ». Ce changement s’applique aussi bien aux RND personnes physiques, qu’aux trusts avec les constituants (settlors) et/ou bénéficiaires jouissant de ce statut.

Désormais, dans le cas d’une détention indirecte simple (immeuble détenu par une société étrangère), il y aura une double imposition économique. Tout d’abord la société sera redevable chaque année de la taxe ATED. Ensuite, lors du décès de l’ayant droit économique, l’immeuble sera inclus dans sa succession et l’IHT sera payé au taux de 40%.

Lorsque l’immeuble appartient à une société étrangère, elle-même détenue par un trust , il pourrait y avoir une triple imposition. En effet, la société étrangère sera redevable annuellement de la taxe ATED, alors que le trust paiera l’IHT à chaque dixième anniversaire au taux de 6% de la valeur nette du bien. Enfin, dans certains cas et notamment lorsque l’acte constitutif du trust permet au constituant de réserver certains pouvoirs sur les biens du trust, le décès de ce dernier entrainera le paiement de l’IHT au taux de 40 %.

Par conséquent, les RND doivent dorénavant évaluer si la détention d’immeubles britanniques à travers des structures étrangères présente un intérêt économique pour eux. La plupart du temps la réponse sera négative, appelant corrélativement la restructuration du schéma de détention.

Solutions envisageables

Tout d’abord, la vente de l’immeuble par la société étrangère puis la liquidation subséquente de celle-ci peut être envisagée. Dans un tel cas, la société subira un impôt sur les gains en capital au taux de 28%, calculé sur les gains réalisés depuis l’instauration de la taxe ATED (c’est-à-dire depuis 2013). Si le bien est vendu avec une dette hypothécaire non remboursée, un droit d’enregistrement (SDLT) sera exigible au taux progressif pouvant atteindre 15% du prix de vente. Les fonds résultant d’une telle vente pourraient ensuite être réinvestis dans un portefeuille de titres déposé sur un compte bancaire étranger. Les revenus ou gains résultant de la gestion d’un tel portefeuille ne seraient pas imposables au Royaume-Uni, à moins d’être rapatrié. Le portefeuille resterait en outre hors de portée d’IHT pendant toute la durée de l’application du régime RND.

Lorsque la société étrangère est elle-même détenue par un trust, il est possible de la liquider et de transférer la propriété de l’immeuble au trustee. Dans ce cas, le trust devra payer l’impôt sur les gains en capital au taux de 28% (sur les gains réalisés depuis 2013), pour être ensuite passible de l’IHT de 6% à chaque dixième anniversaire de sa création. L’acte constitutif (deed of trust) pourrait être modifié pour exclure, le cas échéant, toute réservation de pouvoir au profit du constituant, afin d’éviter le paiement de 40% d’IHT lors du décès de ce dernier. ATED ne serait alors plus exigible.

Il peut arriver enfin que la solution la plus opportune soit de conserver la société étrangère. Ce serait notamment le cas si l’immobilier britannique devait être loué à des tiers. Dans un tel cas, la société serait exonérée de la taxe ATED et les revenus fonciers seraient imposés à l’impôt sur les sociétés au taux de 19% (à comparer avec l’impôt sur les revenus pouvant atteindre 45% en cas de détention directe de l’immeuble).

En guise de conclusion, remarquons que les solutions permettant d’optimiser fiscalement la détention de l’immobilier britannique sont relativement peu nombreuses et présentent un certain coût. Leur intérêt doit être évalué au cas par cas, selon les circonstances de chaque espèce.

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