Back

News

2018/06/07
Agefi - Relations houleuses au sein du couple actions/obligations

Depuis le début de l’année, le rendement des obligations du Trésor américain à 10 ans a augmenté de 2.4% à 3.1%, portant la performance annuelle cumulée de cet actif - considéré depuis plus de 30 ans comme très peu risqué – au-delà de -4%. Au premier trimestre 2018, pour la cinquième fois seulement en 20 ans et la première fois depuis près de 10 ans, les obligations souveraines américaines ont baissé en tandem avec les actions de plus de 1%. Plus généralement, le nombre d’occurrence de baisse simultanée des actions et des obligations dans les pays développés a tendance à augmenter. Sommes-nous à l’aube d’un changement de paradigme au niveau de la relation actions/obligations qui pourrait avoir des conséquences majeures sur les portefeuilles multi-classes d’actifs appelés également « équilibrés » ? 

 

L’allocation d’actifs est l’essence même du dilemme auquel font face la plupart des investisseurs. L’objectif de ce processus d’allocation est d’atteindre une diversification permettant de réduire le risque du portefeuille et d’aboutir à un rendement ajusté du risque optimal. La viabilité du processus de construction de portefeuille repose ainsi grandement sur la corrélation entre les actions et les obligations, les deux composants principaux des portefeuilles équilibrés. 

 

Globalement, depuis plus de 20 ans, la corrélation actions/obligations est négative dans la plupart des économies développées. Les investisseurs multi-classes d’actifs ont ainsi pu compter sur le comportement complémentaire des actions et des obligations – le yin et le yang des marchés financiers -, permettant de réduire à la fois la volatilité et le risque de perte. Qui plus est, le spectaculaire marché haussier observé sur les obligations depuis plus de 30 ans a permis cette réduction du risque avec un coût négligeable en termes de rendement. Depuis 2000, les bienfaits de la diversification actions/obligations ont été particulièrement notables durant les périodes de crises financières, l’allocation obligataire agissant comme un important stabilisateur de portefeuille. 

 

Dans le contexte actuel de réduction du stimulus monétaire au niveau mondial et de cycle économique avancé, une normalisation de certains facteurs économiques nous paraît probable : augmentation graduelle de l’inflation, volatilité accrue de l’inflation et des données macroéconomiques, régime de volatilité des actions supérieur ainsi qu’augmentation des taux courts. Etant donné le niveau actuel très bas des taux obligataires et leur tendance haussière, la capacité des obligations à compenser une baisse des actions diminue, et la classe d’actif pourrait même peser sur le rendement des portefeuilles. 

 

Dans l’éventualité de voir les vertus diversifiantes des obligations s’évaporer, la question de leur exclusion dans un portefeuille équilibré se pose désormais. D’autant plus que d’autres sources de diversification et d’autres mécanismes de gestion du risque sont désormais accessibles à la plupart des investisseurs. Ces sources alternatives de diversification peuvent d’ailleurs avoir des atouts de taille : valorisation attractive, stabilité de la corrélation faible ou inverse avec les actions, pouvoir diversifiant qui augmente en cas de besoin durant les périodes de baisse des actions. Parmi ces instruments on trouve par exemple certaines stratégies alternatives (stratégies d’arbitrage), certaines paires de monnaies (shortAUD/JPY), les stratégies longues sur la volatilité, et certaines stratégies de valeur relative sur les actions (longsecteurs défensifs/shortmarché). 

 

La corrélation actions/obligations est instable au travers des régimes économiques, et les investisseurs feraient mieux de ne pas assumer que les obligations continueront à protéger leur exposition actions à l’avenir. Conserver un mix classique actions/obligations comme source principale de diversification et de réduction du risque revient à implicitement prendre le pari que le régime de corrélation négative en vigueur depuis plus de 20 ans perdurera. Les changements de régimes de corrélation, phénomènes de long terme en général, ont pourtant le potentiel de faire de plus gros dégâts qu’une augmentation de la volatilité. Les investisseurs multi-classes d’actifs devraient considérer des sources de diversification alternatives de manière à conserver leur portefeuille réellement « équilibré ». Il nous paraît également essentiel de complémenter cette diversification étendue par une gestion active du risque.